Aubervilliers, le 12 mai 2017. Mocaplab, l’entreprise spécialisée dans la capture de mouvement créée par Rémi Brun, travaille pour le cinéma, la publicité et les jeux vidéo. Elle conçoit également des sculptures 3D animées. LP/Florian Niget
La start-up d’Aubervilliers en Seine-Saint-Denis est spécialisée dans la « motion capture ». Elle a notamment travaillé pour le film Valérian produit par Luc Besson, qui sort cet été sur les écrans.
Les petits personnages en bâtonnets de la pub pour l’assureur MAIF, c’est eux. Les équipes de Mocaplab ont aussi participé à la prochaine grosse production de Luc Besson « Valerian et la cité des milles planètes », qui sortira au cinéma cet été, au film « Chocolat » avec Omar Sy, au jeu vidéo best-seller Assassin’s Creed et travaillé avec Sean Connery, Jean Reno, Monica Bellucci, Sophie Marceau…
Mocaplab en chiffres
- 8 salariés et une quinzaine d’intermittents et stagiaires travaillent à Mocaplab.
- 30 caméras à 16 millions de pixels captent le mouvement sur un plateau nu de 200 m². Chacune coûte entre 10 000 € et 15 000 € et peut tourner jusqu’à 400 images par seconde.
- 300 projets menés par Mocaplab, depuis sa création, dans les domaines du jeu vidéo, du cinéma, de la publicité, le documentaire, la recherche ou encore l’événementiel.
- 600 000 €, c’est le chiffre d’affaires de Mocaplab.
Installée depuis deux ans à Aubervilliers (Seine-Saint-Denis), la société de création numérique fondée en 2007 par Rémi Brun est devenue en quelques années l’un des spécialistes européens d’une technologie en plein développement : la « motion capture », ou « mocap », pour les intimes. En français : la capture de mouvement.
La motion capture mode d’emploi
La « motion capture » est une technique qui permet d’enregistrer l’évolution dans l’espace de personnes, voire d’animaux ou d’objets, pour la transposer sur ordinateur et l’appliquer à un modèle virtuel. Exemple avec un footballeur qui reproduirait en studio des gestes techniques - tirs, passes, tacles, reprises de volée…- afin qu’ils soient reconstitués dans un jeu vidéo. Pas besoin de terrain pour cela : il lui suffit de revêtir, non pas son maillot de joueur habituel, mais une combinaison noire moulante sur laquelle sont collés des « marqueurs ». Ces boules de mousse recouvertes de papier réfléchissant vont renvoyer la lumière vers des caméras en bord de plateau. Une multitude de points blancs sont alors captés, qui serviront ensuite à reconstituer le mouvement du personnage sur ordinateur.
Un avatar 3D reproduisant la langue des signes
« Nous sommes des ingénieurs du mouvement comme d’autres sont ingénieurs du son », résume joliment son PDG, formé aux Arts et métiers et titulaire d’un doctorat de biomécanique. Le quinquagénaire a consacré la moitié de sa vie à cette spécialité « compliquée et qu’on doit inventer ». Il s’est lancé dans l’aventure à sa sortie des études, en 1993. « Beaucoup trop tôt », reconnaît Rémi Brun, qui depuis a peaufiné la technique à Londres puis à Attitude studio, un studio d’animation parisien.
L’entreprise d’Aubervilliers est spécialisée dans la motion capture, la capture de mouvement. DR.
Mais son vrai bébé, c’est Mocaplab. Seul au départ, il a patiemment fait grossir sa petite entreprise en dix ans. Il s’appuie désormais sur une vingtaine de personnes dans ses locaux neufs de 450 m², aux portes de Paris. La start-up s’est notamment construit une réputation en créant un avatar 3D reproduisant la langue des signes. « Pour être bien compris des sourds-muets, cela demande une précision extrême. C’était un Graal pour nous. On a montré qu’on était capable de reproduire du mouvement très fin », se félicite Rémi Brun.
Des projets pour le cinéma, la pub, les jeux vidéo et la recherche
Aujourd’hui, grâce à son plateau tout équipé de 200 m², son entreprise multiplie les projets pour le cinéma, la publicité ou encore la recherche scientifique et industrielle. Et pour les jeux vidéo, son marché principal, qui représente 50 % de son activité. Mocaplab a collaboré récemment avec la firme française Ubisoft, pour un jeu de sports d’hiver extrêmes, Steep. Ses équipes se sont déplacées avec leur matériel dans une salle de spectacles d’Annecy (Haute-Savoie) pour filmer les figures de spécialistes du ski freestyle… sur un trampoline.
Christel Wallois, comédienne professionnelle, en tournage motion capture. LP/F.Ni.
Elle se souvient parfaitement de sa première expérience : « Je jouais au football sur une planète congelée contre des hologrammes », sourit Christel Wallois. Cette comédienne professionnelle de 40 ans a découvert la motion capture il y a dix ans. C’est aujourd’hui un quart de son activité. Elle tourne pour des jeux vidéo, des publicités et aussi des longs-métrages, comme « Chocolat » où elle était chargée de jouer les femmes du public dans un théâtre. « On se retrouve dans un hangar vide, avec quelques accessoires parfois, mais il faut surtout faire travailler l’imagination. J’adore ça : c’est l’univers de tous les possibles », souligne Christel Wallois. La comédienne, qui tourne aussi bien dans des pubs, des clips musicaux et à la télé, admet que le jeu est « différent. La gestuelle est super importante. Il faut être le plus fluide et naturel possible. On ne voit pas votre tête à l’écran, mais je n’ai pas de problème d’ego ! »
Très utilisée par l’industrie vidéo ludique, la motion capture est pour l’instant moins prisée par celle du film. La technologie que défend Rémi Brun doit encore trouver sa place entre le cinéma traditionnel et l’animation. « La mocap n’est pas de l’animation car elle s’appuie sur un vrai jeu d’acteurs. Et quitte à filmer de vrais acteurs, les gens préfèrent faire du cinéma traditionnel, analyse le PDG de Mocaplab. Mais depuis un an, on a de plus en plus de projets. La mocap fait moins peur et la culture s’installe doucement. »